La simulation en santé en France à connu un essor important à partir de décembre 2012 suite à la publication par le Pr Granry, à la demande de la Haute autorité de Santé (HAS), d’un “Guide de bonnes pratiques en matière de simulation en santé.” Le développement de la simulation s’est ensuite fait de manière progressive par la mise en place de nombreux programmes de simulation majoritairement publics et hospitalo-universitaires autour de l’adage “jamais la première fois sur le patient”. Actuellement il existe environ une centaine de centres de simulation dans le pays qui déclarent pratiquer la simulation en accord avec les recommandations de 2012. Ils sont dirigés par des membres actifs de la communauté de simulation en santé provenant de disciplines variées comme les soins infirmiers, la médecine, la chirurgie ou les plateformes de formation pluridisciplinaire privées.
La Société Francophone de Simulation (SoFraSimS) créée en 2015 tente de centraliser ces initiatives par le biais de sa plateforme internet, de son programme d’évaluation des centres de simulation et de son congrès annuel réunissant plusieurs centaines de participants chaque année mais il semble que de très nombreux programmes de simulation existent en dehors de son champs d’action limitant la vision globale au niveau national.
Le président de la SoFraSimS, le Pr Dan Benhamou reconnait qu’“un partenariat avec l’ensemble de ces structures est indispensable pour que les programmes gardent un lien avec des centres référents universitaires. Le but étant d’harmoniser les pratiques afin de maintenir un niveau de qualité permanent et d’alimenter des réseaux de formation”. Il ajoute “l’objectif commun est de former un maximum de soignants de manière plus homogène quelque soit la structure de pratique de la simulation.”
Concernant la formation des formateurs, là encore il existe un important dynamisme car il existe plus d’une vingtaine de diplômes et certifications universitaires de formateur en simulation, plusieurs masterclass universitaires et privés. La liste est disponible sur le site internet de la SoFraSimS. Notons aussi la présence du groupe EuSim dirigé par Peter Dieckmann via des formations ponctuelles et un partenariat avec l’institut Toulousain de simulation en santé (itSimS). A ce jour, les formations américaines de la Society for Simulation in Healthcare (SSH) donnant les titres de Certified Healthcare Simulation Educator (CHSE) ne sont pas encore délivrées en France à notre connaissance.
Partenariat Avec Les Industriels
Du côté de l’industrie de la simulation, les ténors de la discipline sont présents, directement via leur filiale française (LAERDAL, CAE) ou par le biais de distributeurs (GAUMARD). Le marché de la simulation est globalement partagé entre quelques sociétés de distribution de matériel: MEDICALEM, MICE GROUP, TWIN MEDICAL, FREE MED permettant d’utiliser les principaux mannequins et simulateurs connus sur le marché (3B scientific, 3D System, Kyoto Kagaku, Limbs and Things, Medical-X, Simulab etc.).
Florence Darrieumerlou, responsable des ventes pour CAE en France déclare “La simulation médicale en France est un marché développé et mature,” et “Le marché va continuer à croître en raison de la demande croissante pour intégrer plus de simulation dans les formations initiales et continues, et mettre davantage l’accent sur la sécurité des patients.”
Simulation et COVID-19
La crise du COVID19 à néanmoins permis de révéler un certain dynamisme de la communauté de simulation en santé en France, grâce par exemple à l’expérience partagée des équipes du CHU de Caen et du CHU de Toulouse, qui ont mis leur centre de simulation à disposition des équipes en charge de patients COVID notamment dans les formations “habillage-déshabillage” et les formations à l’airway en situation COVID. Louis Delamarre, formateur en simulation à l’itSimS et auteur d’une publication parue dans la revue Simulation in Healthcare en Janvier 2021 (SIH), déclare “ La crise a permis de montrer l’adaptabilité des équipes de simulation dans la mise en place de formations calibrées pour des contextes variés.”
“Il faut accepter de s’adapter à un contexte (réduire la profondeur et la longueur du débriefing grâce à du feedback direct, cibler des objectifs très simples mais déployables sur de très grandes populations) plutôt que d’essayer de tordre le contexte pour qu’il s’adapte à nos dogmes (séances longues, cas complets…). Cela collait parfaitement avec nos objectifs et le grand volume de personnes à former. ” La plupart des formations ont utilisé les ressources des centres de simulation avec la mise en place rapide de simulation in-situ principalement.
Ouverture à L’internationale
Les connexions françaises à l’internationale sont de plus en plus fréquentes via des programmes de PhD (par exemple avec le Center for Medical Simulation de Boston, Dr Clément Buléon) ou des initiatives de recherche (Department of Innovation in Medical Education at University of Ottawa, Sébastien Couarraze IADE, PhD en science de l’éducation). Notons pour mémoire que le Pr Antoine Tesnière, directeur du centre de simulation Ilumens (Paris Descartes) a présidé la Société Européenne de simulation appliquée à la médecine (SESAM) de 2015 à 2017. Par ailleurs, la SoFraSims à signé une convention de partenariat avec la Society of simulation in Healthcare (SSiH) en 2019 lors du congrès annuel à Los Angeles.
Les jeux sérieux dit “serious games” sont en plein essor avec la publication au mois de janvier 2021 par la SoFraSimS d’un “État des lieux de l’emploi des jeux sérieux pour la formation des professionnels de santé en France” sous la responsabilité du Dr Antonia Blanié.
Patient Simulé Ou Standardisé
Enfin, les programmes de patients simulés ou patients standardisés sont aussi présents sur le territoire avec, là aussi une initiative nationale au crédit de la SoFraSimS animée par Anne Belot, formatrice au CHU de Caen. L’objectif premier est de standardiser la rédaction des cas de simulation utilisant des PS et d’harmoniser la pratique du training des PS.
A Propos De L’auteur
Le Dr. Marhar Fouad est anesthésiste réanimateur, formé au CHU de Toulouse. Il pratique et enseigne la simulation depuis 2012. Il fait partie des membres actifs de la communauté de simulation en Francophonie et est aussi formateur de formateurs en France et dans de nombreux pays européens francophones et non-francophones via le réseau EuSim Group.